Le gaz algérien : miracle énergétique ou cataclysme climatique ?

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Le gaz algérien : miracle énergétique ou cataclysme climatique ?

Face à une crise climatique mondiale et une demande d’énergie en constante augmentation, le gaz naturel s’impose comme une alternative temporaire mais stratégique. Pour certains, il pourrait bien être le « chaîne manquant » de la transition énergétique.

Dans cette équation, l’Algérie, grâce à Sonatrach, est au cœur des discussions. Ce géant gazier incarne à la fois l’ambition et le paradoxe d’un pays qui aspire à devenir un leader mondial tout en faisant face à des critiques environnementales croissantes. Quel sera son véritable rôle dans le futur énergétique mondial ?

Une vision affirmée lors du sommet à Tripoli

Le 18 janvier, le sommet de l’économie et de l’énergie à Tripoli a été le théâtre d’une prise de position forte de Sonatrach, affirmant le rôle stratégique du gaz naturel dans la transition énergétique mondiale. Cet événement, réunissant 1 500 experts et 250 entreprises internationales, a mis en avant l’urgence de trouver des solutions à la croissée des besoins économiques et des enjeux climatiques.

Lors de son discours, Youssef Khanfar, directeur central des énergies vertes et renouvelables chez Sonatrach, a insisté sur l’énergie comme un secteur à la fois confronté à des défis immenses et riche en opportunités pour le développement durable. Cette vision optimiste, également soutenue par Slimane Chenine, ambassadeur d’Algérie en Libye, illustre la volonté de l’Algérie de jouer un rôle moteur dans les débats énergétiques internationaux.

Sonatrach a également mis en avant le besoin d’intégrer les énergies renouvelables dans sa stratégie globale. Selon Khanfar, les défis actuels imposent de conjuguer innovation technologique et coopération régionale. Le bassin méditerranéen, et plus particulièrement le partenariat avec la Libye, a été identifié comme un terrain stratégique pour l’avenir.

Enfin, l’ambition de l’Algérie se veut globale : grâce à Sonatrach, le pays cherche à consolider sa position de leader tout en répondant aux attentes croissantes en matière de durabilité et de diversification énergétique.

Le gaz : une énergie de transition indispensable

Le gaz naturel est présenté par Sonatrach comme une énergie propre et économique, constituant une alternative pertinente aux combustibles fossiles traditionnels. Sa faible empreinte carbone par rapport au charbon et au pétrole, ainsi que la flexibilité qu’offre le gaz naturel liquéfié (GNL), en font un élément clé pour les économies européennes fortement tributaires des importations pour répondre à leurs besoins énergétiques.

En 2022, le président Abdelmadjid Tebboune a exprimé une ambition claire : doubler la production de gaz naturel algérien, la faisant passer de 100 à 200 milliards de mètres cubes d’ici 2028. Cette volonté s’est traduite par une progression spectaculaire en octobre 2024, lorsque l’Algérie est devenue le premier fournisseur de gaz naturel de l’Europe, avec une production record de 137 milliards de mètres cubes, selon la plateforme Energynews.

Ces avancées illustrent l’importance capitale du gaz algérien sur la scène énergétique mondiale, mais elles soulèvent également des questions cruciales sur la capacité du pays à gérer cette ressource stratégique tout en relevant les défis environnementaux et technologiques qui l’accompagnent.

Le bassin de Ghadamès : une opportunité stratégique

L’Algérie, à travers Sonatrach, mise également sur des collaborations régionales pour renforcer sa présence. La reprise des activités dans le bassin de Ghadamès, en partenariat avec la Compagnie pétrolière nationale libyenne, s’inscrit dans cette dynamique. Cette zone géostratégique, riche en ressources naturelles, représente un terrain propice pour accroître les investissements algériens et européens.

Cependant, la stabilité politique en Libye reste un enjeu majeur. Tout dérèglement pourrait mettre en péril ces ambitions. Sonatrach, tout en misant sur une approche pragmatique, devra naviguer avec prudence dans ce contexte.

Enjeux climatiques et critiques

Malgré les nombreux atouts du gaz naturel, son rôle comme énergie de transition est contesté. Certains militants écologistes estiment que d’autres sources énergétiques, comme le solaire ou l’éolien, devraient être prioritaires. Par ailleurs, l’exploitation et le transport de gaz naturel peuvent générer des émissions fugitives de méthane, un gaz à effet de serre plus puissant que le CO2.

Pour répondre à ces critiques, Sonatrach semble vouloir investir dans des technologies visant à minimiser ces impacts. Cela inclut l’électrification des processus d’extraction et des programmes de capture et stockage de carbone.

L’Algérie, partenaire stratégique de l’Europe

L’importance du gaz algérien s’explique aussi par le besoin pressant de l’Europe de diversifier ses sources d’approvisionnement, notamment après les tensions géopolitiques liées à la Russie. La proximité géographique et l’existence d’infrastructures comme les gazoducs TransMed et Medgaz font de l’Algérie un acteur clé.

Cependant, cette dépendance européenne pourrait aussi exposer l’Algérie à des pressions économiques et politiques accrues, surtout dans un contexte de transition vers les énergies renouvelables. L’Algérie devra donc réfléchir à une stratégie à long terme qui intègre la diversifié énergétique.

L’avenir énergétique de l’Algérie : entre opportunités et défis

L’Algérie, à travers Sonatrach, se positionne indéniablement comme un acteur de poids dans la transition énergétique mondiale. Cependant, pour sécuriser son avenir, le pays devra relever plusieurs défis : améliorer la transparence de ses investissements, renforcer la stabilité politique régionale et diversifier ses sources de revenus au-delà du gaz naturel.

Si le gaz naturel reste un « ami de la nature », comme le déclarait Abdelmadjid Tebboune, il n’en demeure pas moins une ressource limitée et controversée. L’avenir énergétique de l’Algérie dépendra de sa capacité à conjuguer ambitions économiques et exigences environnementales dans un monde en pleine mutation.

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