L’Arganier en Algérie : Une Renaissance en Marche ?

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L’Arganier en Algérie : Une Renaissance en Marche ?

L’arganier, cet arbre mythique producteur de l’huile la plus précieuse au monde, est en pleine renaissance en Algérie. Décimé par des décennies de sécheresse, de surpâturage et de déforestation, cet arbre endémique retrouve une nouvelle vitalité grâce à une ambitieuse politique nationale visant à planter 200 000 arganiers.

Entre efforts publics, initiatives privées et recherche scientifique, l’Algérie pourrait bien devenir un acteur majeur de la filière arganier, réécrivant ainsi l’histoire de cet arbre emblématique. Mais quelles sont les chances réelles de succès de ce programme ? Quels défis reste-t-il à relever pour pérenniser cette initiative ?

Le Programme National : Une Politique Visionnaire

L’engagement de l’État algérien

Le président Abdelmadjid Tebboune a donné une impulsion décisive à la renaissance de l’arganier en lançant un programme national ambitieux. Ce projet vise la plantation de 200 000 arbres dans différentes régions du pays, incluant Tindouf, Msila, Mostaganem et Chlef.

À Msila, par exemple, plus de 300 hectares ont récemment été dédiés à cette culture, avec des jeunes plants soigneusement protégés des animaux grâce à des manchons en plastique. Des tracteurs équipés de citernes assurent un arrosage régulier pour favoriser l’enracinement de ces arbres robustes mais vulnérables dans leurs premières années.

À Mostaganem, les efforts se concentrent également sur la réhabilitation des pépinières locales pour fournir des plants de qualité. Cette approche combinée de plantation massive et de soutien aux infrastructures agricoles témoigne de la volonté politique de transformer l’arganier en un pilier de l’agriculture durable en Algérie.

L’enthousiasme des acteurs locaux

Des agriculteurs comme Benhalima Salaouatchi, investisseur privé dans la région de Chlef, montrent un enthousiasme croissant pour cette culture.

Ses plantations, débutées avec une soixantaine d’arbres, comptent aujourd’hui plusieurs centaines d’arganiers qui commencent à fleurir et fructifier. Salaouatchi ne se limite pas à la production d’amandes d’argan : il travaille également à multiplier les plants pour les distribuer à d’autres agriculteurs intéressés.

Les services forestiers, de leur côté, organisent des sessions de sensibilisation et de formation pour accompagner les agriculteurs dans la gestion et la valorisation de cette culture prometteuse.

L’Arganier : Un Trésor Menacé mais Résilient

Les défis historiques de l’arganier

L’arganeraie algérienne, autrefois vaste et prospère, a subi un déclin dramatique au fil des décennies. En 1965, la surface couverte par l’arganier était estimée à environ 700 000 hectares, bien loin des 1,4 million d’hectares recensés à l’ère quaternaire.

Selon des études menées par des experts comme Mohammed Ould Safi, les causes de ce déclin incluent la sécheresse, la pollution, la dégradation des sols, le surpâturage, les coupes illicites et les infestations d’insectes ravageurs comme les termites.

En outre, la récolte massive des fruits pour produire l’huile d’argan a contribué à freiner la régénération naturelle des arbres. À Tindouf, la situation est particulièrement préoccupante. En raison de l’aridité croissante et de l’élevage anarchique, les rares fruits tombés au sol sont souvent consommés par les chèvres et dromadaires avant de pouvoir germer.

Les efforts pour enrayer le déclin

Face à cette situation alarmante, plusieurs initiatives ont vu le jour pour préserver et restaurer les arganeraies. Des universitaires travaillent sur la sélection des variétés les plus productives et sur les meilleures techniques de reproduction en pépinières.

Des recherches récentes se penchent également sur les associations bénéfiques entre l’arganier et certaines espèces de champignons présents dans le sol. Ces champignons mycorhiziens, en symbiose avec les racines, peuvent stimuler la croissance des jeunes plants.

L’idée est d’inoculer ces champignons dans les pépinières pour renforcer la résilience des arbres une fois plantés en milieu naturel.

L’Arganier : Une Opportunité Économique et Environnementale

Une filière à fort potentiel

L’huile d’argan, surnommée « l’or liquide », est prisée dans le monde entier pour ses propriétés cosmétiques et culinaires. Avec des prix pouvant atteindre 300 dollars le litre sur les marchés internationaux, l’arganier représente une opportunité économique majeure pour l’Algérie, notamment pour les régions rurales où l’agriculture peine à prospérer.

Le développement de cette filière pourrait créer de nombreux emplois dans la production, la transformation et la commercialisation des produits dérivés de l’arganier, tout en offrant une source de revenus stable aux communautés locales.

Un rôle clé dans la lutte contre la désertification

Au-delà de ses bénéfices économiques, l’arganier joue un rôle crucial dans la protection de l’environnement. Ses racines profondes contribuent à stabiliser les sols et à prévenir l’érosion, tandis que son feuillage dense aide à retenir l’humidité et à modérer les températures locales.

Dans un pays où la désertification représente une menace croissante, la reforestation par l’arganier pourrait devenir une solution naturelle pour protéger les écosystèmes fragiles et améliorer la résilience des territoires face au changement climatique.

Les Défis à Surmonter

Garantir la viabilité des plantations

Pour assurer le succès du programme de plantation, il est crucial de surmonter certains défis techniques et logistiques. L’arrosage régulier des jeunes plants, indispensable durant leurs premières années, demande des ressources en eau considérables, ce qui peut poser problème dans les régions déjà affectées par la sécheresse.

De plus, la protection contre le surpâturage reste un enjeu majeur. Les initiatives telles que l’installation de manchons en plastique autour des troncs doivent être généralisées pour éviter que les animaux ne détruisent les plantations.

Intégrer les communautés locales

Pour que la renaissance de l’arganier soit pérenne, il est impératif d’impliquer activement les populations locales. Les agriculteurs, éleveurs et habitants des régions concernées doivent être sensibilisés à l’importance de cette ressource et encouragés à adopter des pratiques durables.

Les formations proposées par les services forestiers et les programmes de distribution de plants d’arganier sont des initiatives louables, mais elles doivent être renforcées pour garantir une participation large et efficace des communautés.

Perspectives et Conclusion

L’arganier, symbole de résilience et d’adaptabilité, a aujourd’hui une chance de renaître en Algérie grâce à des efforts concertés entre l’État, les acteurs privés et le monde académique.

Si le chemin reste semé d’embûches, les premiers résultats, tels que la floraison et la fructification des jeunes arbres dans certaines régions, offrent des raisons d’espérer. Pour maximiser les bénéfices de ce programme, il est essentiel de maintenir l’élan actuel tout en adressant les défis liés à la gestion de l’eau, à la protection des plantations et à l’intégration des populations locales.

L’arganier pourrait alors devenir non seulement une source de richesse économique, mais aussi un pilier de la lutte contre la désertification et un symbole de la capacité de l’Algérie à concilier développement durable et préservation de son patrimoine naturel.

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