Crise France-Algérie : La polémique autour de l’influenceur Doualemn annonce-t-elle une rupture définitive ?

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Crise France-Algérie : La polémique autour de l’influenceur Doualemn annonce-t-elle une rupture définitive ?

Les relations entre la France et l’Algérie connaissent une nouvelle phase de tensions, marquée par l’affaire Doualemn, un influenceur algérien expulsé de France mais refusé par Alger. Alors que Paris accuse Alger d’escalade et agite la menace de représailles, la question se pose : la France peut-elle réellement se permettre une rupture avec un partenaire stratégique comme l’Algérie ? Si les conséquences d’une détérioration des relations pour l’Algérie ont souvent été mises en avant, il est crucial de se pencher sur les risques, économiques, géopolitiques et diplomatiques, que cette crise pourrait engendrer pour Paris.

La dépendance énergétique française : un talon d’Achille évident

L’un des enjeux majeurs pour la France réside dans sa dépendance au gaz algérien. Avec la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine et l’arrêt des livraisons de gaz russe via l’Europe, l’Algérie est devenue un fournisseur crucial pour l’Union européenne, y compris pour la France.

En 2023, l’Algérie a exporté une part significative de ses hydrocarbures vers l’Europe, faisant d’elle un acteur clé dans la stabilisation des prix du gaz. Une rupture ou une restriction dans les relations bilatérales pourrait compliquer davantage l’approvisionnement français en énergie, alors que les ménages et les entreprises subissent déjà les effets d’une inflation énergétique.

Paris pourrait se retrouver en difficulté, cherchant à compenser la perte d’un fournisseur fiable par des alternatives plus coûteuses, comme les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) en provenance des États-Unis ou du Qatar. Cette situation mettrait une pression supplémentaire sur l’économie française, déjà confrontée à un ralentissement.

Les entreprises françaises en Algérie : premières victimes d’une rupture

La France compte environ 6 000 entreprises opérant directement ou indirectement en Algérie, avec 201 filiales implantées sur place. Ces entreprises, couvrant des secteurs clés comme l’agroalimentaire, l’industrie mécanique et les infrastructures, réalisent un volume d’affaires estimé à 12 milliards d’euros.

Une rupture dans les relations bilatérales aurait des conséquences désastreuses pour ces entreprises, qui verraient leur accès au marché algérien se restreindre drastiquement. Dans un contexte mondial marqué par une concurrence accrue, notamment de la part de la Chine et de la Turquie, ces pertes pourraient être difficiles à compenser.

En outre, les tensions pourraient compliquer davantage l’obtention d’autorisations d’importation ou de conformité pour les produits français, une difficulté déjà signalée par plusieurs entreprises présentes en Algérie. Cela risquerait d’affaiblir encore plus la compétitivité des entreprises françaises dans une région où elles luttent déjà pour maintenir leur présence.

Un impact géopolitique majeur en Afrique du Nord

L’Algérie est une puissance régionale en Afrique du Nord, un rôle qu’elle joue de plus en plus activement sur la scène internationale. En cas de rupture avec Paris, Alger pourrait se tourner encore davantage vers d’autres partenaires, notamment la Chine, la Russie et la Turquie, qui cherchent à renforcer leur influence dans la région.

Pour la France, cette perte de partenariat stratégique affaiblirait sa position en Afrique du Nord, une région où elle lutte déjà pour conserver son influence face à la montée en puissance d’autres acteurs globaux. Une telle rupture pourrait également compliquer les efforts de Paris pour maintenir des relations solides avec d’autres pays maghrébins, comme le Maroc et la Tunisie, qui observent de près cette crise.

Une crise qui alimente le sentiment anti-français

La France, en adoptant une posture agressive envers Alger, risque également de renforcer le sentiment anti-français en Algérie. Cette hostilité pourrait s’étendre au-delà des sphères politiques, affectant les perceptions des consommateurs et des entreprises algériennes envers les produits et services français.

Déjà, de nombreux Algériens perçoivent les mesures françaises, comme les restrictions sur les visas, comme des outils de pression néocoloniale. Une escalade des tensions pourrait pousser davantage de citoyens et d’entreprises algériennes à boycotter les produits français, renforçant ainsi la dépendance d’Alger à l’égard d’autres partenaires économiques.

Un poids politique intérieur pour Emmanuel Macron

Sur le plan intérieur, cette crise pourrait devenir un casse-tête pour Emmanuel Macron, déjà confronté à des défis politiques et économiques majeurs. La détérioration des relations avec l’Algérie risque de nuire à l’image de son gouvernement, notamment auprès des communautés franco-algériennes en France, qui représentent une part importante de la population.

De plus, les représailles économiques envisagées par Paris pourraient se retourner contre les entreprises françaises, accentuant les critiques à l’égard de la politique étrangère de Macron et alimentant les tensions sociales dans un contexte déjà marqué par une instabilité politique.

La difficulté d’un dialogue de réconciliation

Malgré les menaces de sanctions, Paris semble consciente des risques d’une rupture totale. Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, a exprimé sa volonté de se rendre en Algérie pour ouvrir un dialogue. Cependant, cette initiative risque d’être perçue comme une manœuvre tardive par Alger, qui exige un respect mutuel et la fin des politiques jugées hostiles.

Pour que ce dialogue puisse aboutir, Paris devra adopter une approche plus respectueuse des sensibilités algériennes, tout en évitant de céder à des pressions internes en faveur d’une politique de confrontation.

La France face à un choix stratégique crucial

L’affaire Doualemn et les tensions qui en découlent illustrent les défis d’une relation bilatérale historiquement complexe entre la France et l’Algérie. Si Paris choisit de poursuivre une stratégie de confrontation, les conséquences pourraient être lourdes pour l’économie française, sa position géopolitique en Afrique du Nord, et son image auprès de la diaspora algérienne.

Pour éviter une rupture qui serait dommageable pour les deux parties, il est essentiel que les responsables français privilégient un dialogue sincère et respectueux. Dans un monde où les équilibres de pouvoir évoluent rapidement, une approche fondée sur la coopération plutôt que sur la confrontation pourrait s’avérer être la seule voie viable pour préserver des relations bilatérales durables.

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